La tactique défensive des BATCHINGOU avait consisté à creuser des tranchées et à hisser beaucoup de chapeaux tout le long de ces tranchées, en plaçant quelques hommes rapides qui pouvaient tirer des coups de fusils à plusieurs endroits, afin de faire croire à l’ennemi l’existence d’un grand nombre de combattants. Quant aux femmes, elles étaient chargées d’espionner les positions adverses et en rendre compte à leurs époux. Parmi elles, Metoukep s’est distinguée en allant au front pour le combat. Ces actes de bravoure pour la défense de l’intégrité du territoire BATCHINGOU a valu les titres de ‘’TANKWA’’ aux hommes et ‘’WACHIÉ’’ aux femmes.
La défense était aussi organisée tout le long de la frontière et le commandement des troupes aux chefs des quartiers frontaliers.

C’est ainsi que la guerre de BANGWUE JILEP contre les BAMENA avait pour commandants Tame Mbeupokep et Zoo Mbeuda "Mekep Danou.
Celle contre les BALENGOU fut dirigée par Zoo Fieudieu et Zaa Gong, à leurs côtés le Groupement BANA comme allié. C’est le lieu de signaler que de toutes les communautés voisines, seule celle de BANA est restée neutre, sans engager aucun conflit contre BATCHINGOU.
La guerre contre les BATCHA ne dura pas très longtemps à cause du pacte de non-agression que le chef de ce Groupement avait signé avec le chef BATCHINGOU suite à la supériorité numérique constatée lors des premières incursions. La paix était revenue entre les 2 groupements et la preuve tangible est qu’un notable BATCHA du nom de Wemba Sop avait demandé l’asile à BATCHINGOU et s’y est installé jusqu’à sa mort.

ATTAQUE DES INSTITUTIONS BATCHINGOU

Après les premières batailles gagnées. L’accalmie dura quelques années. Car le Groupement BATCHINGOU a connu d’autres agressions sous le règne de sa Majesté Tchiengué vers 1879 ; alors qu’il accédait au trône. Des mercenaires associés venant de BANGOU et du NOUN voulaient s’accaparer du lieu initiatique ou vivait le nouveau Roi, en vue d’installer un autre prince qui avait été contre l’accession de sa Majesté Tchiengué au pouvoir. Informées de ce coup de force en préparation, les populations BATCHINGOU ont réagi énergiquement en s’organisant et mettant en place une bonne tactique. Elle consistait à laisser entrer les ennemis sans heurt à la chefferie, afin de les prendre par surprise, en les encerclant lorsqu’ils auront attaqué, pour les décapiter un a un.

Il y a lieu de signaler que seul le Prince dissident a eu la vie sauve. Cependant, on lui a formellement interdit de réaliser dans sa concession, une maison au toit conique.

IMPLICATION A LA 2^e GUERRE MONDIALE

Le Groupement BATCHINGOU n'est pas resté à l'écart de la guerre qui secoua le monde de 1939 à 1945. Voici du reste les noms des braves et dignes fils BATCHINGOU alignés à cet effet aux côtés des Français pour la défense de leur territoire :
Yacop Nana. Pierre Ngongne, Mathieu Pawa, Mathieu Ngounou, Caporal Tchiehiep, Sikapi (fils de Mbeu Toukep), Tchiengué (héritier de Zaa Chi), Saha Kwawa, Max Gando, Massa Ngougou. Il faut noter que grâce à la bénédicition de Dieu, tous sont revenus de cette expédition sains et saufs.

AVENÈMENT DE L’INDÉPENDANCE DU CAMEROUN

Un autre moment difficile pou­le Groupement BATCHINGOU s'annonce en 1959, quand se pointe à l'horizon l’indépendance du Cameroun. Alors que la communauté BATCHINGOU vient de perdre son Chef Supérieur, Sa Majesté Ngongang Salomon, un mouvement de panique général s'installe dans le Groupement, provoqué, par un groupe de personnes non originaires de BATCHINGOU appelés "Napgock'', autrement dit "ceux qui arrangent le pays". Ils prônaient la violence, tenaient tu langage dur et de mépris vis-à-vis du nouveau Chef Supérieur et ses notables, créant ainsi la peur et l'inquiétude au sein des populations habituées à respecter leur Roi et sa suite.
Poursuivant leurs actions déstabilisation de la conscience, collective, ces inconnus enlèveront le nouveau Roi pour une destination inconnue.

Le peuple ainsi abandonné à lui-même sera tétanisé et vulnérable devant tout cela.
L’anarchie s'étant installée faute d'autorité, ces individus sans foi ni loi se mirent à malmener, à torturer et à exiger un tribut aux populations. Bien plus, ils firent enlever les tôles des toitures pour une destination inconnue.
Toute désobéissance était punie de mort pour faire exemple. Coincé, le peuple ne pouvait qu'obéir aux maquisards. L'administration qui n'arrivait plus à contrôler la situation faute de liaison avec la hiérarchie tra­ditionnelle se décida à prendre des mesures fortes pour réprimer. Les populations étaient ainsi prises entre le marteau et l'enclu­me. La confusion fût totale, avec comme alternative de rester chez soi, ou se cacher dans les brous­sailles.

Cette situation rendit la vie très difficile à BATCHINGOU, car en décidant de vivre chez soi, on était pris à partie par les maqui­sards qui vous accusaient de tra­hison, et en vivant dans les broussailles, on essuyait les bombardements d'avions de l'administration. Les BATCHINGOU vécurent cette situation jusqu'à l'indépendance du pays.
Après l'avènement de l'indépen­dance, les BATCHINGOU de la dia­spora volèrent au secours du Groupement en organisant une descente sur le terrain depuis Nkongsamba sous l'égide de feu Ngongang Ngomo Jean, avec la collaboration de feu Meilo Louis Robert alors Sous-Préfet. Fongang et son équipe ont sillon­né BATCHINGOU, de Zoutoula à Bangwe, pour convaincre le peuple à dégager les routes bar­rées d'arbres abattus, car l'indé­pendance était acquise.

Le grand rassemblement eut lieu à la Mission protestante de Depnieu au quartier Bangwe. Ce sursaut patriotique donna un regain d'espoir à la population locale pour s'organiser à vivre en groupes serrés dans des groupe­ments afin de riposter contre les agresseurs. L'administration créa un camp de commandos dans les environs afin de leur apporter de l'aide nécessaire.
Une expédition militaire partie de Bafang avec la photo de Sa Majesté Kepgang Mathieu, le délivra de sa prison chez les BATCHA où les ravisseurs l'avaient caché. Cette nouvelle fit la grande joie pour tout le peuple heureux d'avoir retrouvé son guide. Libéré, le Roi fit un petit séjour à Nkongsamba, le temps de lui construire une maison dans le regroupement et il rejoignit ensuite le Groupement BATCHINGOU où il continua à régner jusqu'en 1982.

TENTATIVE D’INVASION DES BATCHA

Le dernier conflit date de 1996, lorsque le Groupement BATCHA, en débordant les limites fronta­lières, viola volontairement le pacte de non-agression signé dans un passé lointain par de regrettés souverains des deux groupements. Tous unis derrière Sa Majesté Nana André Flaubert, les popula­tions BATCHINGOU ont une fois de plus réagi pour défendre l'inté­grité de leur territoire.
Après enquête, les autorités administra­tives provinciales vont donner raison au peuple BATCHINGOU sur la base des limites actuelles, les mêmes que celles arrêtées par l'ancienne administration alle­mande.

Il convient de rendre un grand hommage à la famille Talo qui, pendant tous ces conflits, a forgé à Tchoulo toutes les muni­tions dont la Communauté avait besoin. Dans les forges qui tour­naient jour et nuit, on retrouvait Talo Tchakouop et ses frères Talo Kajui, Talo Tchinang, Talo Kouornou, Talo Wangui et les autres.